Leonora Carrington


Avoir le courage de briser la cage des pensées ordinaires pour plonger dans la confusion primordiale, où le lion d'or à l'oeil rond regarde, dans la profondeur du lotus l'Unicorne, aux fesses laiteuses, baigné des larmes nourrissantes de la jeune lune, le nouveau-né qui ne fume que des momies royales en forme de longues cigarettes parfumées....
Leonora Carrington










Léonora Carrington, connue comme étant une des dernières femmes surréalistes, ancienne compagne de Max Ernst, est morte le 26 mai 2011 à Mexico.
Aristocrate rebelle, anglaise, elle a vécu un temps en France pour s'installer définitivement à Mexico.
Les contes de Léonora Carrington rêvent avec insolence une mutation de soi et du monde, dans un univers stupéfiant de magie terrifique et féminine.
Des contes dérapants et décapants où l'impulsion vient des mots et de la peinture, ils déchirent, brisent, inversent, renversent, ils nous offrent une vision fascinante, ironique et sanguinaire dont l'éclat blesse notre regard.
Peintre, sculpteure, alchimiste et magicienne, les mythes l'ont toujours habités : Léonora Carrington bat les pouvoirs et les croyances comme des cartes.
Son attention de rêveuse, de sorcière, de peintre, de cuisinière et d'écrivaine montre qu'elle s'attache moins au pleins qu'aux déliés, moins aux contenus qu'aux passages - par où s'engouffrent les autres réalités. La science de Léonora Carrington est humour noir, passion des limites, absolu et connaissance de ce qu'on ne peut nommer.



André Breton présente Léonora Carrington:

 Michelet, qui a rendu si belle justice à la Sorcière, met chez elle en lumière ces deux dons, inestimables du fait qu'ils ne sont départis qu'à  la femme "l'illuminisme de la folie lucide" et "la sublime puissance de la conception solitaire".
Il la défend aussi contre la réputation chrétiennement intéressée qu'on lui a faite d'être laide et vieille.
"Au mot Sorcière, on voit les affreuses vieilles de Macbeth. Mais leurs cruels procès apprennent le contraire. Beaucoup précisément parce qu'elles étaient jeunes et belles".

Qui aujourd'hui pourrait, aussi bien que Léonora Carrington, répondre à l'ensemble de cette description ? Les respectables  personnes qui, il y a une douzaine d'années, l'avaient invitée à diner dans un restaurant de marque ne sont pas encore remises de la gêne qu'elles éprouvèrent à constater que, tout en prenant grand part à la conversation, elle s'était déchaussée pour s'enduire patiemment les pieds de moutarde.
(.....)

Sur ces exploits et sur bien d'autres par lesquels, à n'en pas douter elle entend "mettre et retirer le masque qui (la) préservera contre l'hostilité du conformisme" règne un regard velouté et moqueur, tirant grand parti de sa discordance avec une voix rauque. La curiosité, portée à son degré le plus ardent est bien près de trouver son bien dans l'INTERDIT.

Au retour d'un de ses voyages dont on a peu de chances de revenir et qu'elle a relaté dans EN BAS avec une précision bouleversante, Léonora Carrington a gardé la nostalgie des rivages qu'elle a abordés et n'a pas désespéré de les atteindre à nouveau, cette  fois sans trop férir et comme munie d'un permis de circuler à volonté dans les deux sens.
En témoigneraient assez les admirables toiles qu'elle a peintes depuis 1940, sans doute les plus chargées de "merveilleux" moderne, toutes pénétrées de lumière occulte et qui renseigneront aussi bien sur son optique physique ( "le devoir de l'oeil droit est de plonger dans le téléscope tandis que l'oeil gauche interroge le microscope") que son optique intellectuelle ("la raison doit connaitre la raison du coeur et toutes les autres raisons").















 
-->
"aujourd'hui je vis entre la lassitude et le honte d'appartenir à un genre animal comme l'être humain. j'aimerais être une elephante, une éléphante sauvage."